Éco-conception web et digitale : le baromètre 2025 révèle une urgence écologique
05 novembre 2025
L'éco-conception digitale s'impose aujourd'hui comme un enjeu majeur face à l'impact environnemental croissant du numérique. Alors que notre dépendance aux technologies s'intensifie, l'empreinte carbone de nos services numériques explose, atteignant désormais 4,4 % des émissions nationales en 2025.
Le Baromètre de l'Éco-Conception Digitale 2025, publié par Razorfish et GreenIT, dresse un état des lieux préoccupant et souligne l'urgence d'agir. Cet article vise à définir les concepts clés, analyser les tendances actuelles et outiller les professionnels pour répondre à cet objectif environnemental incontournable.
Sommaire
Éco-conception : définition et cycle de vie d'un service numérique
Qu'est-ce que l'éco-conception numérique ?
L'éco-conception numérique correspond à l'intégration des préoccupations environnementales dès la phase de conception d'un service numérique et tout au long de son cycle de vie. Cette démarche d'amélioration continue vise à réduire l'empreinte écologique des sites web, applications et autres services digitaux tout en maintenant, voire en améliorant, leurs performances.
Concrètement, il s'agit d'optimiser chaque étape du développement et de l'exploitation des services numériques en privilégiant la sobriété, l'efficience et la pertinence. Cette approche permet de diminuer les impacts environnementaux (consommation d'énergie, émissions de CO2, utilisation de ressources rares) tout en améliorant l'expérience utilisateur grâce à des temps de chargement optimisés et une navigation plus fluide.
Les 3 piliers du numérique responsable
L'éco-conception s'inscrit dans une approche systémique plus large, celle du numérique responsable, qui repose sur trois piliers fondamentaux.
Le premier pilier, environnemental (Planet), vise la réduction de l'empreinte carbone et la préservation des ressources naturelles à travers tout le cycle de vie des services numériques. Le deuxième pilier concerne la dimension sociale (People), qui place l'humain au centre de la démarche en garantissant l'accessibilité des services à tous les utilisateurs, quels que soient leurs capacités ou leurs équipements.
Enfin, le troisième pilier économique (Profit) assure la viabilité des projets en optimisant les coûts d'exploitation et en renforçant l'attractivité des entreprises. Cette vision holistique permet d'aborder les enjeux du numérique de manière globale et cohérente, en considérant l'ensemble des impacts et des parties prenantes.
Étapes clés de la phase de conception
La phase de conception est cruciale dans une démarche d'éco-conception, car c'est à ce moment que sont prises les décisions qui détermineront l'impact environnemental du service numérique. Voici les étapes essentielles à respecter pour une conception responsable :
- Définition des objectifs et de l'unité fonctionnelle : identifier précisément le besoin et la fonction principale du service
- Analyse du cycle de vie : évaluer les impacts potentiels à chaque étape (fabrication, distribution, utilisation, fin de vie)
- Spécification fonctionnelle : déterminer les fonctionnalités essentielles et éliminer le superflu
- Conception de l'architecture : privilégier une structure légère et évolutive
- Prototypage et tests : valider les choix techniques et l'expérience utilisateur
- Documentation : assurer la traçabilité et la transparence de la démarche
Cette méthodologie rigoureuse permet de créer des services numériques qui répondent aux besoins des utilisateurs tout en minimisant leur impact environnemental, dans une logique de sobriété et d'efficience.
Conception numérique responsable : un enjeu stratégique en 2025
La conception numérique responsable s'impose aujourd'hui comme une nécessité pour les entreprises face à l'urgence écologique. Alors que la part du numérique dans les émissions de gaz à effet de serre en France devrait atteindre 4,4 % en 2025, soit près du double par rapport à 2020, l'adoption de pratiques responsables devient un levier stratégique incontournable.
Pour les entreprises, l'éco-conception web ne représente pas uniquement un engagement environnemental, mais aussi un avantage économique concret. Un site éco-conçu permet de réduire jusqu'à 40 % les coûts d'exploitation tout en améliorant significativement les performances techniques.
La simplicité et la légèreté des interfaces augmentent la vitesse de chargement, ce qui se traduit par une meilleure expérience utilisateur et un référencement naturel optimisé. Les moteurs de recherche favorisent en effet les sites rapides et efficaces, ce qui génère davantage de trafic qualifié et améliore le taux de conversion.
À l'inverse, ignorer ces enjeux expose les organisations à des risques majeurs, notamment celui de l'obsolescence accélérée des équipements numériques. Entre 1985 et 2015, la durée d'utilisation d'un ordinateur a été divisée par 3, passant de 11 à 4 ans, créant une pression constante sur les ressources. Les entreprises qui n'intègrent pas la conception numérique responsable dans leur stratégie s'exposent également à des coûts énergétiques croissants et à une dégradation de leur image de marque dans un contexte où 89 % des Français se déclarent inquiets face au changement climatique.
| Indicateur | Valeur |
|---|---|
| Consommation électrique du numérique en France | 7 à 8 % du total national |
| Économies potentielles via l'éco-conception | Jusqu'à 40 % des coûts d'exploitation |
| Durée de vie moyenne des équipements | 4 ans (contre 11 ans en 1985) |
| Entreprises adoptant une stratégie numérique responsable | Moins de 40 % |
| Impact environnemental d'un site éco-conçu | -100 000 kgeCO2 par milliard de pages vues |
Baromètre 2025 : une stagnation inquiétante de l'éco-conception web
L'étude 2025 (https://www.greenit.fr/barometre-de-lecoconception-digitale/), qui a analysé 90 sites web majeurs (CAC40 et top 50 e-commerce) sur la base de 900 URLs générant 3,5 milliards de pages vues, révèle une régression globale de la maturité en matière d'éco-conception web. Cette tendance alarmante intervient dans un contexte où la part du numérique dans les émissions de gaz à effet de serre en France devrait atteindre 4,4 % en 2025, soit près du double par rapport à 2020.
Méthodologie : l'EcoIndex comme outil de mesure
Pour évaluer la performance environnementale des sites web, le baromètre s'appuie sur le score EcoIndex, un outil de mesure standardisé et reconnu dans le secteur. Cet algorithme de référence pondère trois critères techniques fondamentaux :
| Critère | Coefficient de pondération |
|---|---|
| Nombre d'éléments de la page (DOM) | x3 |
| Nombre de requêtes HTTP | x2 |
| Poids de la page (en Ko) | x1 |
Un score sur 100 est ensuite attribué, classant les pages de A (très performant) à G (très peu performant). Cette méthodologie permet d'obtenir une évaluation objective et comparable de l'impact environnemental des sites analysés, servant de référence pour le secteur.
Résultats généraux : un retour en arrière alarmant
Le score EcoIndex moyen des sites étudiés est de 25/100, correspondant à une note « E ». Ce résultat marque une régression significative, effaçant les progrès observés entre 2022 et 2024. La comparaison des données 2024/2025 est particulièrement révélatrice :
| Indicateur | 2024 | 2025 | Évolution |
|---|---|---|---|
| Score EcoIndex moyen | 30/100 | 25/100 | -16,7 % |
| Poids moyen par page | 2,1 Mo | 2,8 Mo | +33,3 % |
| Requêtes HTTP moyennes | 74 | 89 | +20,3 % |
| Éléments DOM moyens | 1250 | 1460 | +16,8 % |
Cette baisse de 5 points par rapport à 2024 a des conséquences concrètes : pour chaque milliard de pages vues, cela représente une surconsommation de 1,5 million de litres d'eau et l'émission de 100 000 kgeCO2 supplémentaires.
Le e-commerce à la traîne, le CAC40 recule
Le secteur du e-commerce affiche les performances les plus faibles, avec un score moyen de 18/100 (note F). Un chiffre record de 86 % des sites e-commerce analysés obtiennent un score de F ou moins, témoignant d'une complexité technique croissante (+28 % d'éléments DOM en moyenne depuis 2022) qui n'a pas été maîtrisée.
Les sites corporate du CAC40 ne font guère mieux. Avec une moyenne de 35/100 (note E), ils sont également en recul. 30 % d'entre eux affichent un score de F ou moins, le pire résultat en quatre ans. Les causes identifiées sont principalement des refontes de sites qui n'intègrent pas les principes d'éco-conception et des ajouts continus de fonctionnalités qui alourdissent les pages.
Éco-conception site web : que nous apprend le baromètre ?
Le baromètre 2025 met en lumière plusieurs enjeux de l'éco-conception web cruciaux pour l'avenir du secteur. D'abord, il démontre qu'une approche responsable du développement web n'est plus une option mais une nécessité écologique. La tendance à l'alourdissement des sites (+33,3 % de poids moyen en un an) va à l'encontre des principes de sobriété numérique.
Le rapport souligne également que l'éco-conception site web doit être intégrée dès les phases initiales de tout projet digital. Les exemples de réussite, comme le site d'Orange qui a gagné 26 points d'EcoIndex en 4 ans, prouvent que des améliorations significatives sont possibles lorsque cette démarche est adoptée sur l'ensemble du cycle de vie du projet.
Cette vision globale permet d'optimiser non seulement la phase de développement, mais aussi la maintenance et l'évolution du site, garantissant ainsi une performance environnementale durable. Face à ces constats, les professionnels du web sont appelés à repenser leurs pratiques et à adopter une démarche d'éco-conception web rigoureuse, alliant performance technique, expérience utilisateur optimisée et impact environnemental réduit.
Éco-conception site web : bonnes pratiques et exemples concrets
La 5e édition du référentiel Green IT publiée en 2025 propose 115 bonnes pratiques pour transformer notre approche du développement durable numérique. Face à l'urgence écologique révélée par le Baromètre de l'Éco-Conception Digitale, il est impératif d'adopter des pratiques de sobriété pour réduire l'empreinte environnementale de nos sites web.
10 bonnes pratiques pour un site sobre
Pour garantir une expérience utilisateur optimale tout en limitant l'impact environnemental de votre site web, voici les bonnes pratiques essentielles à mettre en œuvre :
- Simplifier le design : privilégier un design épuré qui facilite l'utilisation et réduit la consommation de ressources
- Adopter l'approche « mobile first » (BP006) pour optimiser le site sur tous les supports
- Réduire le poids des pages en compressant les images et en limitant leur nombre
- Minimiser les requêtes HTTP pour accélérer le chargement des pages
- Limiter les éléments DOM qui alourdissent la structure de la page
- Utiliser les CSS pour les effets visuels plutôt que des images
- Éviter les carrousels et méga-menus qui augmentent la complexité technique
- Optimiser le code en supprimant les scripts inutiles
- Choisir un hébergement éco-responsable alimenté par des énergies renouvelables
- Éliminer les points de friction pour réduire le temps passé par les utilisateurs sur le site
Ces pratiques s'inscrivent dans une démarche globale d'éco-conception qui vise à intégrer les enjeux environnementaux dès la phase de conception des services numériques.
Étude de cas : optimisation d'une page e-commerce
L'optimisation d'une page e-commerce illustre parfaitement les bénéfices concrets de la mise en place de nouvelles fonctionnalités éco-conçues. Dans le cas d'un site de vente en ligne analysé dans le Baromètre 2025, l'application des principes d'éco-conception a permis des gains significatifs :
| Critère | Avant | Après | Gains |
|---|---|---|---|
| Score EcoIndex | 18/100 (note F) | 42/100 (note C) | +24 points |
| Poids de la page | 3,8 Mo | 1,2 Mo | -68 % |
| Nombre d'éléments DOM | 1450 | 650 | -55 % |
| Requêtes HTTP | 95 | 32 | -66 % |
| Consommation d'eau/page | 3,5 L | 1,1 L | -69 % |
| Émissions CO₂/page | 2,1 g | 0,7 g | -67 % |
Cette transformation a été rendue possible par la simplification de l'interface, l'optimisation des images, la réduction du nombre de scripts et l'élimination des fonctionnalités superflues. Les bénéfices vont au-delà de l'aspect environnemental : le site est désormais plus rapide, plus performant et offre une meilleure expérience utilisateur, ce qui se traduit par une augmentation du taux de conversion de 15 %.
L'éco-conception web n'est plus une option mais un impératif business qui influence directement la compétitivité et l'image de marque des entreprises en 2025.
Éco-conception logicielle et architecture durable
Dans un contexte où l'impact environnemental du numérique s'intensifie, l'éco-conception logicielle émerge comme une nécessité absolue. Alors que les émissions liées au numérique devraient tripler d'ici fin 2025, les pratiques de développement responsable deviennent cruciales pour limiter cette empreinte croissante. Cette approche systémique vise à optimiser l'ensemble du cycle de vie des applications, depuis leur conception jusqu'à leur exploitation.
Réduire l'empreinte du code
La refactorisation du code représente un levier majeur pour diminuer l'impact environnemental des systèmes d'information. Contrairement aux idées reçues, ce n'est pas tant le choix du langage de programmation qui importe, mais plutôt l'effort d'optimisation consenti. Une application mal optimisée consomme davantage de ressources serveur, quelle que soit la technologie utilisée.
Des études récentes montrent qu'un code propre et optimisé peut réduire jusqu'à 30 % la consommation énergétique d'une application. La clé réside dans l'adoption d'outils spécialisés comme Ev-DEC ou Ecochain qui permettent d'analyser et d'améliorer les performances environnementales des logiciels. Les bonnes pratiques incluent :
- L'élimination du « code mort » qui alourdit inutilement les applications
- L'optimisation des requêtes vers les bases de données
- La mise en place de mécanismes de mise en veille des processus non utilisés
- La compression intelligente des données et des assets
Choix d'architecture et performance
Le débat entre architectures monolithiques et microservices prend une dimension environnementale importante. Si les microservices offrent une flexibilité accrue, ils multiplient aussi les communications réseau et les infrastructures nécessaires. Une approche systémique est indispensable pour évaluer l'impact global d'une architecture sur l'ensemble de son cycle de vie.
La mutualisation des ressources cloud représente une solution prometteuse, permettant de réduire l'obsolescence des équipements informatiques. À titre d'exemple, un quart des équipements de la police nationale est devenu obsolète en octobre 2025 avec la fin du support de Windows 10, représentant 25 000 ordinateurs à remplacer. Une architecture bien pensée peut prolonger significativement la durée de vie des équipements existants.
| Critère | Architecture monolithique | Architecture microservices |
|---|---|---|
| Consommation CPU | Modérée (ressources centralisées) | Élevée (surcharge de communication) |
| Empreinte mémoire | Importante par instance | Distribuée mais plus grande au total |
| Durée de vie matérielle | Réduite (montées en charge difficiles) | Prolongée (scalabilité horizontale) |
| Consommation réseau | Faible (communications internes) | Élevée (communications entre services) |
| Adaptabilité écologique | Limitée (tout ou rien) | Flexible (optimisation ciblée) |
Éco-conception design : allier UX et sobriété
L'éco-conception des interfaces numériques représente un levier d'action essentiel pour réduire l'impact environnemental du web. Alors que le Baromètre de l'Éco-Conception Digitale 2025 souligne l'urgence d'agir, le design se positionne comme un facteur déterminant dans la conception de services numériques plus respectueux de l'environnement. Cette approche va bien au-delà des considérations techniques : elle repense fondamentalement l'expérience utilisateur pour la rendre à la fois plus intuitive et moins énergivore.
Design système frugal
Le design frugal s'impose comme une tendance forte en 2025, remettant au goût du jour l'adage « less is more ». Cette philosophie minimaliste n'est pas synonyme d'appauvrissement mais de retour à l'essentiel. Les interfaces minimalistes présentent de nombreux avantages :
- Réduction significative du poids des pages (jusqu'à 60 % de données en moins)
- Diminution du nombre d'éléments DOM qui alourdissent le rendu des pages
- Meilleure lisibilité et accessibilité pour tous les utilisateurs
- Temps de chargement optimisé, particulièrement sur mobile
- Durée de vie prolongée des appareils grâce à une sollicitation moindre
Le site Low-tech Magazine constitue un exemple emblématique de cette approche, avec une interface si peu gourmande qu'elle peut être hébergée localement et alimentée à l'énergie solaire. D'autres entreprises comme Orange ont démontré qu'il est possible de gagner jusqu'à 26 points d'EcoIndex en quatre ans grâce à l'adoption d'un design système frugal.
Mesurer l'impact sur l'expérience utilisateur
La sobriété numérique ne doit pas se faire au détriment de l'expérience utilisateur. Au contraire, les deux approches se renforcent mutuellement. Pour évaluer cette synergie, plusieurs métriques s'avèrent particulièrement pertinentes :
- Le temps d'utilisation de l'application ou du site sur différents appareils
- Le taux de conversion et d'engagement selon les parcours utilisateurs
- La facilité de préhension mobile, mesurée par des tests d'ergonomie tactile
- Le taux d'abandon par page ou étape de navigation
- Les retours qualitatifs des utilisateurs via des tests d'utilisabilité
Les interfaces optimisées pour la sobriété favorisent généralement une utilisation plus intuitive. Selon les dernières études, 89 % des utilisateurs mobiles privilégient désormais les interfaces épurées, et 68 % d'entre eux quittent immédiatement un site jugé trop complexe ou lent à charger. En adoptant une démarche d'éco-conception design, les entreprises répondent non seulement à l'urgence écologique soulignée par le Baromètre 2025, mais créent également des expériences digitales plus efficaces et satisfaisantes pour leurs utilisateurs.
Éco-conception formation : monter en compétence
Face à l'urgence écologique révélée par le Baromètre de l'Éco-Conception Digitale 2025, les entreprises doivent rapidement développer leurs compétences en matière d'éco-conception web. Avec seulement 40 % des organisations ayant adopté des stratégies numériques responsables, la formation des équipes devient un levier stratégique incontournable pour inverser la tendance alarmante observée dans le secteur digital.
Se former au RGESN et au RWEB
La maîtrise des référentiels officiels constitue la base d'une démarche d'éco-conception structurée et efficace. Le RGESN (Référentiel Général d'Écoconception de Services Numériques) et le RWEB (Référentiel d'Écoconception Web) sont aujourd'hui les standards les plus reconnus par les professionnels.
Une étude récente montre que 72 % des experts s'appuient sur le RWEB et 64 % sur le RGESN pour leurs projets d'éco-conception. Ces référentiels complémentaires permettent d'acquérir une vision globale et opérationnelle, couvrant à la fois les aspects techniques, stratégiques et UX/UI d'un projet digital responsable. Un programme de formation certifiant offre aux équipes la possibilité d'intégrer ces bonnes pratiques dès la phase de conception, réduisant ainsi significativement l'empreinte environnementale des services numériques.
Formations webdesign et service numérique
Pour transformer l'ambition écologique en réalité concrète, les équipes doivent maîtriser des compétences spécifiques selon leur domaine d'intervention. Les formations en éco-conception adaptées aux différents métiers du web constituent un investissement essentiel pour toute organisation souhaitant réduire son impact environnemental.
Les concepteurs d'interfaces doivent apprendre à créer des designs sobres et performants, tandis que les développeurs doivent maîtriser les techniques d'optimisation du code et des ressources. Les experts en service numérique quant à eux, doivent acquérir une vision transversale intégrant les enjeux techniques, fonctionnels et stratégiques de l'éco-conception.
Ces formations permettent non seulement de réduire l'empreinte carbone des projets, mais aussi d'améliorer l'expérience utilisateur tout en réalisant des économies substantielles grâce à l'optimisation des ressources. Face à la régression inquiétante constatée dans le Baromètre 2025, l'investissement dans la montée en compétence des équipes représente un levier essentiel pour construire un numérique à la fois innovant et responsable.
Écoconception ADEME : cadre réglementaire et normes ISO
L'écoconception numérique s'inscrit désormais dans un cadre réglementaire structuré en France et en Europe. Face à l'urgence environnementale mise en évidence par le Baromètre de l'Éco-Conception Digitale 2025, les autorités ont multiplié les initiatives pour encadrer et encourager des pratiques numériques plus responsables.
Le rôle de la Commission européenne et de l'ADEME
La Commission européenne joue un rôle moteur dans l'harmonisation des pratiques d'écoconception à l'échelle continentale. Elle a notamment développé les méthodologies Product Environmental Footprint (PEF) et Organisation Environmental Footprint (OEF), intégrées dans la Recommandation 2021/2279. Ces méthodes d'analyse du cycle de vie permettent de mesurer et communiquer l'impact environnemental des produits et services numériques selon des critères standardisés.
En France, l'ADEME (Agence de la transition écologique) s'est positionnée comme l'acteur public de référence en matière d'écoconception numérique. L'agence a participé à l'élaboration du Référentiel Général d'Écoconception de Services Numériques (RGESN) en collaboration avec l'Arcep et l'Arcom. Ce référentiel s'appuie sur les normes ISO essentielles comme l'ISO/IEC 62430:2019 pour l'écoconception et les ISO 14040/14044 pour l'analyse du cycle de vie.
La loi REEN (Réduction de l'Empreinte Environnementale du Numérique), adoptée en novembre 2021, constitue une avancée majeure dans ce domaine. Elle impose notamment aux collectivités de plus de 50 000 habitants d'élaborer une stratégie numérique responsable d'ici janvier 2025, avec des objectifs chiffrés de réduction d'impact. Cette loi prévoit également l'intégration de modules d'écoconception dans les formations d'ingénieurs informatiques et la création d'un observatoire de l'empreinte environnementale du numérique pour suivre les progrès réalisés.
L'ère de l'IA : nouveau front de l'impact environnemental
La seconde partie du baromètre se penche sur l'intelligence artificielle, dont l'impact environnemental pourrait être multiplié par sept d'ici 2030. L'étude compare les IA « génératives » (comme ChatGPT dans son usage classique) et les IA « agentiques », capables d'exécuter des séquences d'actions de manière autonome.
Limiter l'impact des outils IA dans un projet digital
Le constat est sans appel : pour des tâches de recherche ou de création de contenu, les interfaces d'IA génératives sont en moyenne deux fois plus performantes sur le plan environnemental que les IA agentiques. Pire encore, utiliser une IA agentique pour une tâche qui pourrait être réalisée par une IA générative a des conséquences désastreuses. Pour une même requête de comparaison de produits, l'étude a mesuré un impact environnemental jusqu'à 60 fois supérieur lors de l'utilisation d'un agent conversationnel par rapport à une IA générative classique.
Pour limiter l'impact des outils IA dans vos projets digitaux, plusieurs pratiques de sobriété s'imposent :
- Privilégier les IA génératives pour les tâches de recherche et de création de contenu
- Mesurer systématiquement la consommation énergétique de vos outils IA
- Réserver les IA agentiques aux cas d'usage qui le justifient vraiment
- Optimiser les prompts pour réduire le nombre d'itérations nécessaires
- Comparer les performances environnementales des différentes solutions IA disponibles
Ces bonnes pratiques permettent de concilier innovation technologique et responsabilité environnementale, en choisissant le bon outil pour le bon usage.
Vers un digital innovant et raisonné : recommandations et perspectives
La conclusion du Baromètre 2025 est claire : il est urgent de construire un digital innovant mais raisonné. La régression observée en matière d'éco-conception web et la montée en puissance des IA énergivores posent la question de la soutenabilité de notre écosystème digital.
Plan d'action entreprise
Les entreprises ont un rôle crucial à jouer dans cette transformation. Un plan d'action efficace repose sur plusieurs piliers essentiels qui impliquent l'ensemble des parties prenantes :
- Former les équipes aux bonnes pratiques d'éco-conception et aux référentiels RGESN/RWEB
- Intégrer systématiquement l'éco-conception dans tous les projets de refonte ou de création
- Définir des objectifs chiffrés de réduction d'impact environnemental
- Questionner la pertinence de chaque fonctionnalité avant son développement
- Choisir des outils adaptés aux besoins réels, notamment pour l'IA
Suivi et mesure
La mise en place d'indicateurs de performance environnementale est indispensable pour atteindre vos objectifs. Le suivi régulier via des outils comme EcoIndex permet d'évaluer les progrès réalisés et d'identifier les axes d'amélioration prioritaires. Cette mesure continue garantit que les efforts déployés produisent des résultats concrets et durables.
Pour une analyse complète et détaillée, nous vous invitons à consulter le rapport complet sur le site de GreenIT : Baromètre de l'Éco-Conception Digitale 2025.
FAQ sur l'éco-conception digitale
Quels sont les 3 principes généraux de l'éco-conception ?
L'éco-conception digitale repose sur trois principes fondamentaux qui guident toute démarche responsable. Premièrement, la sobriété fonctionnelle qui consiste à éliminer les fonctionnalités non essentielles et à optimiser les parcours utilisateurs pour réduire le temps passé sur le service numérique. Deuxièmement, l'interopérabilité technique qui garantit que le service s'appuie sur des standards communs aux principaux écosystèmes (terminaux, navigateurs, systèmes d'exploitation). Troisièmement, la sensibilisation des équipes aux enjeux environnementaux, avec la formation des concepteurs, développeurs et autres acteurs du projet aux bonnes pratiques d'éco-conception. Ces principes permettent de réduire significativement l'impact environnemental tout en améliorant l'expérience utilisateur.
Qu'est-ce que la Journée éco-conception numérique ?
La Journée éco-conception numérique est un événement annuel organisé par l'association Designers Éthiques qui se tiendra le 6 février 2025. Cette journée rassemble la communauté des professionnels du numérique (développeurs, data scientists, ingénieurs, designers, product owners) autour des enjeux écologiques du secteur digital. L'événement propose des retours d'expérience concrets, des ateliers d'expérimentation et des discussions sur l'actualité de la discipline. Son objectif est de promouvoir un numérique « émancipateur, durable et désirable pour les individus, la société et l'environnement » en partageant les meilleures pratiques d'éco-conception entre professionnels.
Comment mesurer les impacts environnementaux d'un site web ?
La mesure de l'impact environnemental d'un site web s'effectue principalement grâce à des outils spécialisés comme EcoIndex, disponible gratuitement sur Ecoindex.fr. Cet outil analyse trois critères techniques fondamentaux : le nombre d'éléments de la page (DOM) avec un coefficient de pondération x3, le nombre de requêtes HTTP (x2) et le poids de la page en Ko (x1). EcoIndex attribue ensuite un score sur 100 et une note de A à G, permettant d'évaluer l'efficacité environnementale absolue et la performance relative. Cette évaluation permet de quantifier l'empreinte carbone et la consommation d'eau associées à chaque page vue, offrant ainsi des pistes concrètes d'amélioration.
Quels outils pour initier un projet d'éco-conception logicielle ?
Pour initier un projet d'éco-conception logicielle, plusieurs outils spécialisés sont disponibles en 2025. Creedengo, solution Open Source intégrée à SonarQube, permet d'analyser le code source pour identifier les pratiques non éco-responsables grâce à un référentiel de règles d'éco-conception. Ecodesign Studio offre une approche structurée de la démarche en proposant un outil collaboratif de gestion de projet relié à des bases de données spécifiques à l'économie circulaire. Pour les suites collaboratives, des solutions comme Interstis proposent des environnements de travail éco-conçus intégrant communication, gestion de projet et GED. Ces outils permettent non seulement de réduire l'empreinte carbone des logiciels mais aussi d'améliorer leur qualité et leur performance.
Références
- Bordage, F., Dollot, C., Nguyen, O., & Sainton, S. (2025). Baromètre de l'Éco-Conception Digitale 2025. Razorfish, GreenIT.
- ADEME, Arcep, Arcom. (2024). Référentiel Général d'Écoconception de Services Numériques (RGESN).